Maudie

de Thomas Fersen

Ô ma douceur
Je rentre à la maison
L'âme et le pantalon
Débraillés
J'ai bu comme un siphon
J'ai la bouche en chiffon
Je reviens sans un rond
Nettoyé
Le nez en couleur
Et le teint rubicond
Je rentre à reculons
Au foyer
Implorant ton pardon
Dans une sourde oraison
De hoquets, de jurons
Émaillée

Ô ma douceur

Ô ma douceur
Je rentre mais c'est long
Et j'en crache mes poumons
D'être à pied
J'ai l'hiver aux talons
Et mon pauvre veston
Dans son rang de boutons
Veut bailler
Un fond de liqueur
Et je tiens le ponpon
Je risque le plomb
À brailler
Et le ciel me répond
Une pluie de postillons
C'est un temps de saison
Vous croyez?

Ô ma douceur

En passant sur le pont
Je me dis: À quoi bon
Et puis: Allons, allons
Je riais
Et voilà que je pleure
Comme un petit garçon
Dans les bras d'un piéton
Effrayé
Il me remet d'aplomb
Car cet homme est maçon
Et moi, comme un pinson
Égayé
Par son petit flacon
Je rentre à la maison
L'âme et le pantalon
Débraillés

Ô ma douceur

Puis le jour moribond
Revient de l'horizon
Pour battre les buissons
Les clapiers
Moi je baisse le front
Comme un pilleur de troncs
Je rentre à la maison
Dévoyé
Ô ma douceur
J'ai peur de l'abandon
Je rentre à la maison
Te choyer

Ô ma douceur
Ô mon doux compagnon
Mon toutou de salon
Je rentre à la maison
Je rentre à la maison
Je rentre à la maison

Ô ma douceur

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